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Organiser des chasses commerciales peut justifier un refus d’autorisation de cession d’un bail rural

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Organiser des chasses commerciales peut justifier un refus d’autorisation de cession d’un bail rural

Organiser des chasses commerciales

peut justifier un refus d’autorisation de cession d’un bail rural

 

Aux termes de l’article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, “(…) toute cession de bail est interdite (…)”

Toutefois, le texte précise qu’elle peut être autorisée “avec l’agrément du bailleur, au profit du conjoint ou du partenaire d’un pacte civil de solidarité participant à l’exploitation ou aux descendants du preneur ayant atteint l’âge de la majorité ou ayant été émancipés.”

Et à défaut d’accord du bailleur, le preneur peut en demander l’autorisation au tribunal paritaire des baux ruraux.

L’arrêt ici rapporté porte sur les conditions que doit vérifier le juge pour autoriser, ou non, la cession d’un bail rural.

Saisi d’une demande de cession de bail le tribunal doit, en effet, vérifier que s’il venait à autoriser la cession, celle-ci ne porte pas atteinte aux intérêts légitimes du bailleur.

Il doit alors regarder si, d’une part le cessionnaire pressenti est en mesure de respecter ses obligations nées du contrat et, d’autre part, si le cédant a été “de bonne foi” tout au long du bail, s’il a bien respecté toutes ses obligations.

Ainsi par exemple, n’est pas de bonne foi le preneur qui a systématiquement été en retard dans le paiement de ses fermages. Sa demande de cession de bail doit donc être rejetée (cass. 3è civ., 24 novembre 2009, n°08-21472).

C’est sur cette question de bonne foi que la Cour de cassation vient encore une fois de se prononcer, au regard de deux obligations dont disposent les preneurs de baux ruraux: en matière de travaux sur le bien loué, ainsi que de droit de chasser.

Les faits

  1. D est agriculteur. Son exploitation agricole est en partie composée de parcelles louées à Mme R, qui en est propriétaire.

Voyant arriver une retraite bien méritée, M. Dupont a souhaité céder son exploitation à sa fille. Il a donc dû, en vertu de l’article L. 411-35 précité, recueilli l’accord de Mme Roger, pour lui céder le bail dont il était titulaire, mais il s’est vu opposer un refus catégorique.

  1. D a donc demandé cette autorisation au tribunal paritaire des baux ruraux.

 

Mais finalement saisie du litige, la cour d’appel d’Amiens a refusé d’autoriser la cession du bail à la fille de M. D, au motif que ce dernier n’aurait pas été suffisamment de bonne foi.

  1. D a formé un pourvoi en cassation.

 

L’arrêt de la Cour de cassation

Par son arrêt du 5 novembre 2014 (cass., 3è civ., 5 novembre 2014, n°13-24503, publié au bulletin), la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par M. D, et confirmé l’arrêt de la cour d’appel d’Amiens ayant refusé d’autoriser la cession du bail au profit de sa fille.

Pour en arriver à cette conclusion, elle a relevé deux points importants:

*La mise en herbe des parcelles louées

Il ressortait des pièces du dossier que M. D avait mis en herbe certaines des parcelles louées pour y faire pâturer des chevaux. Or, il résulte de l’article L. 411-29 du code rural et de la pêche maritime que le preneur à bail rural ne peut mettre en herbe des parcelles qu’avec l’autorisation du bailleur, et qu’à défaut d’accord, il doit fournir au bailleur, dans le mois qui précède les travaux, une description détaillée de ces derniers afin qu’il puisse, le cas échéant, saisir le tribunal paritaire des baux ruraux pour s’opposer aux travaux.

Malheureusement, M. D n’avait jamais demandé cette autorisation à Mme R, ni même ne lui avait adressé un descriptif des travaux. Il n’avait donc pas satisfait à ses obligations.

La Cour de cassation a donc validé la Cour d’appel d’en avoir déduit que ce manquement interdisait de lui reconnaître la qualité de preneur de bonne foi et d’avoir rejeté la demande de cession pour ce motif.

*L’organisation de chasses commerciales

Par ailleurs, la Cour de cassation a relevé qu’il ressortait des pièces du dossier que M. D organisait des chasses commerciales, notamment sur les parcelles louées.

Or, si l’article L. 415-7 permet au preneur à bail rural de chasser sur le fonds loué, ce droit de chasser n’est qu’un droit personnel réservé au seul titulaire du bail (Cass. Soc., 13 avril 1967), que le preneur ne peut pas céder.

C’est la raison pour laquelle la Cour de cassation, ayant relevé que M. D avait loué son droit de chasser, a approuvé la Cour d’appel d’avoir considéré que cette circonstance suffisait à caractériser la mauvaise foi de M. D et, partant, à rejeter sa demande de cession de bail.

Conséquences de l’arrêt

Cet arrêt est important en ce qu’il apporte des précisions sur le droit de chasser du preneur à bail rural.

Il était admis depuis longtemps que ce droit n’était qu’un droit personnel.

 

Pour autant, la Cour de cassation refusait d’admettre la résiliation du bail au motif que le bien aurait été sous-loué lorsque seul le droit de chasser avait été loué, considérant que la mise à disposition du droit de chasser n’équivalait pas une mise à disposition du bien loué ( cass. 3è civ., 16 juin 1999).

Elle considérait alors que la cession du droit de chasser, certes constituait un manquement de la part du preneur, mais pas d’une gravité telle qu’il pouvait justifier la résiliation du bail.

Désormais le cadre est encore plus précis : la résiliation non, mais le rejet de la demande de cession oui.